Fidélités multiples

Publié le 1 Février 2006

Au fil de trackbacks et de liens recommandés, j’ai passé une heure à lire des pages traitant de la « fidélité » en amour. Sur un journal intime bien classé d’over-blog.com, un groupe de vingtenaires parle de ses « liaisons foireuses » ; Nina y a posté un article « Fidélité, infidélité, polyamour » où elle pose le problème en toute franchise, à partir de son vécu personnel. Sur un autre site, dans « To be or not to be… fidèle ? », Wonderblonde nous annonce que, « la fidélité, [elle] y croit dur comme fer »… Elle propose aussi un sondage dont le résultat tendrait à prouver que la plupart de ses lectrices et lecteurs partagent sa croyance. Suivent une trentaine de commentaires auxquels elle réagit parfois en contradiction avec une certaine tolérance qu’elle affichait au départ.

Ce ne sont que deux exemples parmi bien d’autres. Le sujet de la fidélité en amour est traité sous de multiples aspects dans la blogosphère, tantôt de façon distanciée, avec références historiques, philosophiques, littéraires, d’autres fois à partir de l’expérience ou des convictions personnelles des auteurs. On cite beaucoup, avec avis partagés, le bouquin de Paule Salomon, « Bienheureuse infidélité », dont je n’ai lu que des extraits, et plus rarement « Aimer plusieurs hommes » de Françoise Simpère, qui me paraît moins perchée ; cette auteure utilise le sexe pour parler du désir, et pas l’inverse. C’est ce que je retrouve avec délectation chez la grande prêtresse du sexuellement incorrect, Anne Archet. J’aime aussi cet amour « minimaliste », tellement suggestif, que nous confient Ligérienne et son Amant.

Dans les blogs et commentaires de plus jeunes femmes, le lecteur masculin/libertin/collectionneur/prédateur est souvent mis sur la touche par des déclarations de fidélité inconditionnelle à « mon chéri » — bien que l’appellation ait été déposée par Ferrero. ;-)

J’ai écrit à Wonderblonde que les catégories de son sondage me paraissaient biaisées par un point de vue univoque : celui de la « fidélité » comme un idéal à atteindre, souhaiter ou rejeter. C’est le vécu qui me paraît important : précarité ou perennité du « contrat » ? L’amour en CDI ou CNE ? Par exemple, essayez de demander sous le couvert du secret à des quinquagénaires, hommes et femmes, s’ils « croient » à la monogamie, et combien ils ont connu de partenaires sexuels. Jusqu’à présent, j’ai constaté que de nombreux hommes monogames étaient plutôt des polygames free lance ; ils finissent, en fin de carrière amoureuse, par compter plus de partenaires que les adeptes de « l’amour libre », sauf que la « fidélité » les oblige à briser leur couple chaque fois qu’ils en changent… Les enfants paient les pots cassés. Ça vaudrait donc peut-être le coup de repenser ce processus autrement qu’en termes de moralité, pression sociale, spéculations philosophiques ou fantasmes romantiques.

Que mettons-nous dans ce mot « fidélité » ? Passer sa vie avec une même personne ? Ne reconnaître qu’un(e) partenaire sexuel(le) ? Ne pas « tromper » — au sens de mentir ? N’avoir aucun secret pour l’autre ?

Je ne peux pas accepter de débattre d’une notion à la fois aussi vague et lourde de croyances ou d’attentes inexprimées… Est-ce que Nina a bien fait de rester exclusive avec Guillaume, avec qui, par la suite, elle a rompu ? Elle seule peut conclure, je n’ai pas de recette ; mais, à la place de Bertrand, j’aurais certainement fait le premier pas qu’elle semble regretter d’avoir attendu.

Rédigé par Bernard Bel

Publié dans #PRISES DE TETE

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