Belvédère
Publié le 21 Août 2005
Le jardin exotique de Monaco est construit sur le flanc d’un rocher qui surplombe la ville de plus de 200 mètres. Il se prolonge par une grotte qui descend à 4 mètres seulement du niveau de la mer. Tout en haut, il y a des belvédères où les visiteurs peuvent contempler la ville, le rocher avec le palais princier et les maisons anciennes, les routes et voies ferrées, les ports, la mer…
C’est sur un de ces belvédères que j’ai aperçu trois vieux assis sur un banc. Je me souviens d’un homme avec une casquette, mince, le regard pétillant, qui parlait avec deux femmes. De là où ils étaient assis, ils ne pouvaient pas voir la ville. Leur seule vue était la mer lointaine, le ciel, l’horizon, le tout noyé dans un bleu indifférencié, en ce jour torride de fin de canicule. Ils n’avaient aucun contact avec la ville, le trafic, les constructions vaniteuses, l’agitation humaine. Leurs yeux étaient tournés vers une frontière incertaine à l’infini. Je me suis demandé pourquoi ils venaient passer des heures dans ce lieu, sous la brûlure du soleil, dérangés par les touristes, sans même profiter du paysage… C’est alors que j’ai compris que leurs regards étaient dans leur monde intérieur, un monde qu’ils visitaient ensemble par la parole, les rires, les silences.
Jamais je n’ai vu à quel degré ce monde intérieur est plus réel que les images que renvoient les belvédères à nos yeux écarquillés… Sauf peut-être une fois, dans un reportage qui montrait un vieux maître de Ki Jong, riche de sa sensation de vivre, dans son pauvre appartement d’une banlieue chinoise. A quel point nous avons fui les mondes intérieurs, pendant de longues années d’occupation(s), car ils suintaient nos douleurs anciennes. Comme les odeurs de l’hôpital, tout en bas, remontent jusqu’à la rampe du belvédère.
J’ai remercié ces trois vieillards, dans le fond de mon cœur, et je suis descendu en silence dans la grotte du jardin.
C’est sur un de ces belvédères que j’ai aperçu trois vieux assis sur un banc. Je me souviens d’un homme avec une casquette, mince, le regard pétillant, qui parlait avec deux femmes. De là où ils étaient assis, ils ne pouvaient pas voir la ville. Leur seule vue était la mer lointaine, le ciel, l’horizon, le tout noyé dans un bleu indifférencié, en ce jour torride de fin de canicule. Ils n’avaient aucun contact avec la ville, le trafic, les constructions vaniteuses, l’agitation humaine. Leurs yeux étaient tournés vers une frontière incertaine à l’infini. Je me suis demandé pourquoi ils venaient passer des heures dans ce lieu, sous la brûlure du soleil, dérangés par les touristes, sans même profiter du paysage… C’est alors que j’ai compris que leurs regards étaient dans leur monde intérieur, un monde qu’ils visitaient ensemble par la parole, les rires, les silences.
Jamais je n’ai vu à quel degré ce monde intérieur est plus réel que les images que renvoient les belvédères à nos yeux écarquillés… Sauf peut-être une fois, dans un reportage qui montrait un vieux maître de Ki Jong, riche de sa sensation de vivre, dans son pauvre appartement d’une banlieue chinoise. A quel point nous avons fui les mondes intérieurs, pendant de longues années d’occupation(s), car ils suintaient nos douleurs anciennes. Comme les odeurs de l’hôpital, tout en bas, remontent jusqu’à la rampe du belvédère.
J’ai remercié ces trois vieillards, dans le fond de mon cœur, et je suis descendu en silence dans la grotte du jardin.