Gay pride à Rueil-Malmaison

Publié le 7 Septembre 2005

C’est un article un peu ancien d’Agathe André, que je viens de scanner, mais c’est une histoire édifiante ; autant vous en faire profiter !

Monica et Camille, les mariés du quatrième sexe

Charlie Hebdo, 4 mai 2005, p. 6

Avouez, cher Patrick Ollier, qu’il ne vous avait pas préparé à ça, votre mentor politique. Quand, en 2001, après des décennies de gouvernance municipale, Jacques Baumel vous installa sur le fauteuil confortable de la mairie de Rueil-Malmaison, bourgade ultra-bourgeoise des Hauts-de-Seine, il vous enseigna à serrer les mains des petits vieux friqués, à brosser dans le sens du poil les notables influents, à satisfaire le sentiment d’insécurité en multipliant les effectifs de la police, à parler mixité sociale en démantelant progressivement le seul quartier populaire de la ville, à célébrer dignement l’union civile de bons catholiques... Mais les temps ont changé, cher Patrick, et voilà que la charmante Camille, employée depuis dix ans au conservatoire de Rueil, vient troubler ce bel ordre établi : à quarante-six ans, elle veut épouser Monica, délicieuse Argentine de trente ans.

Plus amoureuses que jamais, ces drôles de dames.

Et dans leur bon droit : ces deux compagnes, nées hommes, peuvent s’épouser en toute légalité. Camille a changé de sexe en 1990, et d’état civil par la même occasion. Elle est devenue Melle Camille Joséphine Barré. Monica, elle, a beau posséder les plus beaux nichons siliconés de la ville, elle conserve un état civil masculin : Benito Martin Leon. Civilement, donc, un homme, une femme chabadabada.

Le mari de MAM va faire mieux que Mamère.

Mon cher Patrick, vous qui crachiez avec vos pairs sur le mariage homo célébré par Noël Manière, vous voilà au cour de l’aberration du système, coincé entre le genre social et le genre légal, condamné dans un premier temps à aller chercher la petite bête en doutant de la virilité de Monica — c’est interdit : on tâte les couilles du pape avant son intronisation, pas celles des citoyens avant le mariage —, puis, dans un second temps, à saisir le parquet de Nanterre pour brandir le seul moyen en votre pouvoir pour contester cette union : le spectre du mariage de complaisance. C’est petit. Certes, Monica est en cours de régularisation et ne dispose pour l’heure que d’une autorisation provisoire de séjour, mais, là encore, l’irrégularité de séjour ne représente en rien une entrave au mariage, jugé comme une liberté fondamentale. Comme le dit Camille : « Moi, contrairement à Ollier, je l’épouse, la femme que j’aime. » C’est vrai, ça : comment se fait-il qu’un homme aussi vertueux et soucieux de l’ordre moral que vous n’ait toujours pas demandé la main de sa douce Michèle Alliot-Marie ?...

Allez, Patrick, lâchez-vous, laissez la société réinventer ses libertés. Et vous serez la plus belle pour aller danser à la Marche des fiertés lesbiennes, gaies, bi et trans du 25 juin prochain. Applaudi par vos deux mariées.

AGATHE ANDRÉ

Rédigé par Bernard Bel

Publié dans #CENSURÉ

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